Simulacre de mariage pour séparer les jumeaux frère et soeur
Je vous ai déjà parlé du sort des jumeaux de Mananjary. Les bébés jumeaux sont considérés comme source de malédiction. Autrefois, on les mettait à mort. De nos jours, d’après ce que j’ai entendu dire, ils sont abandonnés par leur famille et finissent dans des centres d’accueil ou dans des familles d’adoption.
Aujourd’hui, je vais parler d’une autre tradition malgache concernant les jumeaux, plus précisément les jumeaux de deux sexes. Selon la culture malgache, le frère et la sœur sont des êtres « mpifady » (personnes tabous). Ils ne doivent pas se voir nus l’un l’autre. Ils ne peuvent pas se marier. En partageant le ventre de leur mère, le frère et la sœur ont pourtant malgré eux transgressé l’interdit. Et toujours selon les croyances, ils risquent de tomber amoureux entre eux plus tard en ayant justement été réunis dans le même utérus.
Dans la tradition malgache, lorsqu’il y a violation de « fady » (tabous), il faut conjurer le mauvais sort qui s’en suivrait. Pour le cas des jumeaux garçon et fille, la pratique veut qu’on rompe le ‘lien marital’ qu’il y a entre eux deux grâce à un simulacre de mariage. Voici des témoignages.
Vola: « Lorsque l’enfant est capable de marcher et courir tout seul, on construit une maisonnette en chaume où on place les jumeaux. On met le feu à cette cabane [ouverte] et les bébés se débrouilleront pour s’en sortir. »
Mi: « Je suis née avec un frère jumeau. Nos parents ont respecté cette tradition. Ils nous ont raconté que mon frère et moi sommes sortis de la cabane en feu à quatre-pattes. Je n’en ai aucun souvenir parce qu’on avait moins d’un an. Les adultes qui ont assisté à la cérémonie ont, parait-il, déclaré que désormais on n’était plus mari et femme mais frère et sœur. »
Andria: « On a fait pareil avec mes aînés frère et sœur jumeaux. On leur a fabriqué une maison en carton et on y a mis le feu. Et il y avait même une fête. Maintenant, on ne dirait pas des jumeaux. C’est plutôt mon frère et moi qui sommes proches. »
La rupture du sort s’explique par le fait que les deux frère et sœur sauvent chacun leur vie sans se soucier de l’autre. Cela signifie qu’ils prennent chacun leur route dans la vie.
Faut-il garder ces croyances? Doit-on encore suivre la tradition? Certains parents ont témoigné qu’ils ne l’ont pas fait et que leurs enfants se portent à merveille. Beaucoup d’autres préfèrent ne pas mettre la vie de leurs enfants en danger. Néanmoins, il y a ceux qui veulent respecter les coutumes pour ne pas hériter des mauvais sorts.
Dans un article précédant, dans lequel j’ai parlé des interdits pendant la grossesse, j’ai avoué ne pas trop croire en ces superstitions. Je respecte toutefois ma culture et ma tradition où nos Ntaolo (ancêtres) sont réputés pour être dotés de sagesse. Le fait de parler aujourd’hui de cette histoire dans mon blog est ma contribution pour mettre à l’écrit le maximum d’us et coutumes malgaches. J’avoue n’avoir jamais entendu auparavant de cette tradition concernant les jumeaux frère et sœur. Une intéressante tradition que j’ai découverte par hasard sur les réseaux sociaux.
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