Lalatiana Rahariniaina

Film « Ady Gasy »: La débrouillardise malgache à l’honneur

Scotchée devant le grand écran de l’IFM pendant 85mn. Totalement plongée dans le reportage. Beaucoup de remise en question personnelle. Nouvelles découvertes de mon pays et de son peuple. Fierté nationale. Tels étaient mes émotions devant le film documentaire « Ady Gasy » (la débrouillardise malgache). J’ai eu la chance de le regarder, enfin. Et je n’ai pas été déçue du tout. C’était samedi (18 avril 2015) dans le programme des Rencontres du Film Court.

Capture d'écran - Documentaire "Ady Gasy"
Capture d’écran – Documentaire « Ady Gasy »

En effet, ce documentaire, brillamment réalisé par Lova Nantenaina, relate l’ingéniosité des malgaches dans la vie de tous les jours et surtout face aux difficultés et aux misères. Votre ampoule est brulée? Elle va direct à la poubelle. Et pourtant, quelqu’un va la récupérer des bacs à ordures pour la revendre. Avec un peu de bricolage, une autre famille la transformera en une lampe à pétrole. Et ce n’est qu’un exemple.

J’ai enfin pu découvrir comment on fabrique le « savony gasy » (savon malgache fabriqué artisanalement). Savon que j’ai utilisé dans mon enfance pour soigner la peau abimée par le froid de l’hiver. Ça ne sentait pas trop bon mais c’était efficace.

AAEAAQAAAAAAAAL6AAAAJDRiM2YyMjRhLWQ1MTktNDc4MS04MWViLTdhZWE0OGQyNWViYQL’image ci-dessus (qui n’a rien à voir avec le film) a créé une polémique sur Facebook auprès des malgaches. Sans rentrer dans le message réel que veut véhiculer son auteur, je peux répondre:

« Comment ne pas être fière d’être malgache? Comment ne pas croire en ces gens qui arrivent à s’en sortir avec si peu grâce à l’inventivité et la persévérance? »

Une belle leçon de vie que j’ai pu tirer du documentaire.

https://www.youtube.com/watch?v=3UlHqwdkMVE

Merci au film « Ady Gasy » et à toute l’équipe réalisatrice de m’avoir fait passé un bon moment, mais surtout de m’avoir rappelé cette valeur malgache, ce magnifique mode de vie.

 


Rencontres du Film Court – Le public s’exprime

Hier soir (17 Avril 2015), j’ai assisté à l’ouverture officielle de la 10ème édition des Rencontres du Film Court (RFC)– Madagascar. C’est parti pour 9 jours de festival. Au programme: projections de films, ateliers et rencontres avec des professionnels du cinéma.

J’arrive au parking de la Gare Soarano. Je m’installe. Et voilà qu’un ami m’interpelle. Je lui lance: « Ah, Salut!… Alors, qu’est-ce tu fous ici? » L’ami qui s’appelle Mika me répond: « J’aimerai voir si les malgaches ont gagné en expérience dans la réalisation de films et dans l’interprétation des rôles. Je suis persuadé qu’ils peuvent être bons.« 

Je suis moi-même venue pour voir où en sont les cinéastes malgaches. J’apprécie particulièrement les films projetés durant les RFC. A mon humble avis, ils sont loin d’être des produits bassement commerciaux comme ceux vendus dans les rues. On ressent le travail, les recherches et surtout la passion qu’il y a derrière.

La rencontre avec cet ami a été un déclic: pourquoi ne pas connaitre l’avis du public? J’ai eu donc de brèves discussions avec certains d’entre eux.

10e Rencontres du Film Court - Madagascar

Toutes ces personnes s’accordent à dire que les films gasy connaissent une nette amélioration. Comme Njo qui déclare: « Le produit gagne en qualité. Au tout début des RFC, j’étais assez dubitatif. Mais on sent vraiment qu’il y a eu un réel effort des réalisateurs et des organisateurs. » C’est un constat qui est partagé par Anjara: « Je constate que nous avons aussi de très bons films et de belles réalisations ici à Madagascar. Il y a  des réalisateurs qui maitrisent déjà tous les cotés techniques. Je citerai en particulier, un ami, Nantenaina Fifaliana. Certains acteurs maitrisent aussi leur performance. »

« C’est déjà bien mais il y a encore du chemin à faire« , dit Andry. Il a soulevé les problèmes de budget et de matériels. Stéphanie confirme ce problème financier: « Le problème à Madagascar, les cinéastes n’ont pas toujours les fonds nécessaires pour faire un film. Le Ministère de la culture et du patrimoine ne s’occupe pas des sorts de ces réalisateurs gasy. » Elle ajoute: « Le plus souvent, le bruitage des films malgaches est encore mal maitrisé. On entend plus les bruits des voitures que le dialogue des acteurs. »

Je pense que les organisateurs des Rencontres du Film Cours peuvent se féliciter de la réussite et de la renommée de cet évènement. Mots du public avec qui j’ai discuté:

Andry: « C’est une bonne initiative. »

Stéphanie: « J’aime le Festival Rencontres du Film Court parce que ça me permet tout d’abord de mieux apprécier le talent des réalisateurs malgaches mais ça représente aussi une opportunité de voir les réalisateurs étrangers qui viennent chaque année aux RFC. »

Li: « Ce qui me motive à venir assister aux RFC c’est pour connaitre les réels vécus de l’Homme à travers les films. Le public devrait ressentir que la pauvreté et l’angoisse qui transparaissent dans ces films sont le quotidien des malgaches. »

Njo: « J’apprécie les RFC. En 10 années d’existence, le festival n’a pas cessé d’évoluer. Cet évènement a sa raison d’être. J’espère que l’amélioration continuera. J’espère aussi voir ces films malgaches diffusés à la télévision et dans les salles de cinéma. »

Les RFC sont pour moi une occasion unique de découvrir des nouveaux talents et surtout des chefs-d’œuvre cinématographiques. Je m’intéresse particulièrement aux œuvres malgaches. Bon festival aux organisateurs, aux cinéastes et aux cinéphiles!

 


Parent d’enfant autiste : « Le combat de toute une vie »

« Voir et entendre mon fils autiste écrire et lire quelques mots sous l’encadrement de sa sœur ainée… ‘y a pas mieux pour finir la journée… Merci les enfants. »

Je suis le fier papa de Tsiky 9 ans, en classe de 8ème et Lucas, 8 ans en Cours Préparatoire. Et vous l’avez compris, Lucas est autiste.

Rien ne nous, sa mère et moi, laissait présager que notre Lucas serait autiste. La grossesse s’est bien déroulée et il ne présentait aucun signe de ce handicap à la naissance. Ce n’est qu’entre deux et trois ans que l’on a constaté qu’il s’isolait de plus en plus, ne parlait pas, ne se retournait pas quand on appelait son nom. Il criait souvent, devenait toujours nerveux, ne prêtant aucune attention aux autres.

Après plusieurs visites chez le pédiatre (et divers tests), celui-ci nous a redirigé vers un orthophoniste, qui, à son tour, a diagnostiqué un syndrome autistique (après une séance d’évaluation d’une heure environ avec Lucas).

Pour nous, c’était le vide total ! En tant que parents, nous n’avions pas réalisé l’annonce du résultat de diagnostic. C’est la première fois qu’on en a entendu parler. On nous disait que l’autisme n’était pas une maladie mais que c’est un état, qu’il n’y avait pas de remède miracle, ni de médicaments pour  le guérir. Ce n’est que là que nous avons commencé à nous documenter sur internet et où nous n’avons pas trouvé de réponses réconfortantes.

Dans ce temps là, l’entourage ne comprenait même pas ce qu’était l’autisme. A force de remarques désobligeantes par rapport au comportement imprévisible (et souvent dans un état de crise), à un certain moment, nous avons fini par zapper les sorties (en famille ou en groupe). A l’époque, on n’avait aucun contrôle sur le comportement de Lucas, et souvent on passait pour de mauvais parents qui, soit gâtaient leurs enfants, soit n’avaient aucune autorité sur eux.

Lucas et sa famille
Lucas et sa famille

Vous voulez peut-être savoir comment il est maintenant? Mais pour les parents d’autistes,

« Il importe plus de voir l’évolution de l’enfant depuis le début, plutôt que de s’arrêter à constater son état actuel. »

Lucas, à trois ans, ne pouvait même pas tenir un crayon. Il ne s’adaptait pas au changement. Il avait le regard fuyant (ne soutenait jamais un regard) et il était tout le temps dans sa bulle – ne s’intéressait à personne d’autre. Il n’aimait pas qu’on le touche. Il avait un déficit d’attention : il ne se concentrait jamais longtemps sur une chose.

Grâce aux efforts combinés d’un psycho-motricien (grand merci à Mr David), et d’une orthophoniste (notre reconnaissance aussi à Madame Rose), et dernièrement avec l’appui de Mr Menja, nous pouvons dire que Lucas s’épanouit de plus en plus. Il faut noter que divers expériences de socialisation l’ont aussi beaucoup aidé. En effet, depuis tout ce temps, nous avons toujours envoyé Lucas dans diverses écoles standard – pour ensuite le transférer vers une autre école à la fin de l’année pour diverses raisons. Nous profitons aussi de l’occasion pour exprimer notre reconnaissance aux différentes maitresses d’école qui ont eu à gérer Lucas depuis qu’il a fréquenté les bancs de l’école : la compréhension et la patience de ces enseignantes ont aussi contribué à son évolution positive.

Lucas adore l’école- surtout quand il y a de l’espace où il peut se dépenser physiquement. Actuellement, Lucas passe à l’école dans la matinée, et dans l’après-midi il est pris en main par un orthophoniste et une autre personne qui fait du suivi personnalisé pour son cursus scolaire. Lucas est arrivé à un stade où il cherche à jouer avec les autres enfants.

Un enfant autiste a des difficultés de communication verbale, ce n’est pas pour autant qu’il n’essaie pas de communiquer. Les gens qui ont l’habitude d’être avec lui le comprennent, ce qui n’est pas le cas avec les autres. Parfois, ces derniers préfèrent prendre leur distance ne sachant pas trop comment lui parler, même si actuellement Lucas commence à chercher des interactions. Il nous approche pour discuter. On ne comprend pas toujours ce qu’il veut nous raconter mais on sent qu’il y met de tout son cœur et on lui montre de notre côté qu’on l’écoute. Ça le rassure. Il faut savoir aussi qu’actuellement, de premier abord, Lucas ne présente aucun signe extérieur de différence.

Vous n’imaginez pas la satisfaction qu’il a quand il voit que vous essayez de comprendre (et que vous avez compris) ce qu’il cherche.

« Vivre avec un enfant autiste nous apprend à accepter la différence. »

Certes, cela prend du temps avant d’assumer que nous avons un enfant autiste, et c’est toujours un combat quotidien d’essayer de l’intégrer dans la société où nous vivons (où les préjugés sont rois) : mais nous avons aussi beaucoup à apprendre d’un enfant autiste. Il est admis qu’un enfant autiste a souvent de super-talents dans un domaine donné : en tant que parents, nous lançons un appel pour que les gens qui aient la patience de travailler avec un enfant autiste se manifestent. En effet, tantôt ce sont des enfants qui excellent dans l’art plastique, tantôt dans la musique, tantôt dans les maths ou autres disciplines : les parents d’autistes ont besoin de travailler avec des personnes qui puissent les aider à révéler et nourrir ces talents.

L’autisme n’est pas une maladie, c’est un état. Nous aimons à croire qu’il est différent et que c’est à nous de trouver les moyens pour qu’il arrive à s’intégrer, à sa façon, à la société dans laquelle nous vivons. Avant, on voulait tellement qu’il suive le parcours normal d’un enfant – à ce jour, nous sommes de plus en plus en faveur de l’option où nous devons développer les aptitudes de Lucas au lieu de focaliser nos efforts pour le rendre « normal ».

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Je remercie Hery Zo et sa femme d’avoir bien voulu accepter de répondre à mes questions.


Comment célèbre-t-on le Nouvel An Malgache?

Le nouvel an malgache a été célébré les 20 et 21 mars 2015. Beaucoup ne le savent pas encore mais Madagascar, dans l’ancien temps, a suivi le calendrier lunaire d’après les historiens. A l’arrivée des colons français en 1897, le calendrier grégorien a été adopté.

Depuis 2009, un groupement d’historiens et de citoyens soucieux de préserver la culture ancestrale essaie de faire revivre la célébration du Taombaovao Malagasy (nouvel an malgache). Depuis le début, je me suis intéressée à cet évènement. Et comme beaucoup d’autres gens, je me suis posée de nombreuses questions: Est-ce un évènement créé de toutes pièces? Comment se fait-il qu’on n’en a jamais entendu parlé auparavant? Est-ce la bonne date? Quels sont les rituels? En quelle année sommes-nous sensés être d’après ce calendrier malgache? etc. Quelques-unes de ces questions ont été répondues dans ce billet que j’ai publiée l’année dernière: Le Nouvel An Malgache.

Cette année, je suis allée à Andohalo et à Ambohitrabiby pour essayer de comprendre comment se déroule la célébration de ce nouvel an.

A Andohalo le 20 Mars 2015:

Afo tsy maty (feu qui ne s’éteint pas)

Afo tsy maty Lors du dernier jour de l’an, on passe une nuit blanche ou « Andro tsy maty« . On allume alors un grand feu « Afo tsy maty » qu’on attise jusqu’aux premières lueurs de la journée pour marquer la continuité des bonnes choses.

A partir du feu allumé, les convives allument des bougies. C’est ce qu’on appelle: partage de lumière ou « fizarana hazavana« . Les enfants font ensuite le tour du quartier avec leurs lampions – « harendrina« .

Les chants, les musiques et les danses se succèdent jusqu’au petit matin.

A Ambohitrabiby le 21 Mars:

Je suis allée avec ORTANA à la colline sacrée d’Ambohitrabiby pour assister à la célébration du dit nouvel an.

On a commencé par la levée du drapeau et l’hymne nationale suivie d’une petite cérémonie religieuse. Se sont succédé par la suite des discours des différents organisateurs et personnages publics.

Fafy rano (bénédiction)

Fafy ranoOn a aspergé l’assistance d’eau sacrée pour la bénir.

Tatao

Vary amin-dronono tondrahan-tantely

On a partagé du riz sosoa avec du lait et du miel (vary amin-dronono tondrahan-tantely) à tous les convives. Pour effectuer la cérémonie du tatao, on soulève le riz par-dessus la tête avant de la manger. Ce rite est sensé protéger contre une éventuelle famine.

Hasina (offrande)

Du temps des royaumes, les citoyens offraient des pièces d’argent aux rois/reines. Pour garder le rituel, on a aussi fait des offrandes aujourd’hui. La somme recueillie sera versée au profit de la réhabilitation du palais d’Ambohitrabiby.

Zara-hasinaOn a ensuite offert des santa-bary (prémices du riz) pour remercier et bénir tous ceux qui ont donné des offrandes. C’est le zara-hasina.

Hira gasy (musique traditionnelle malgache)

Hira gasyL’après-midi, tous les villageois ont pu apprécier la performance des musiciens de hira gasy (Mpihira gasy). C’est plus qu’un simple show, c’est aussi une réelle transmission de message de sagesse pour la population.

Une petite remarque: malgré les efforts déployés par les organisateurs, je ressens encore un grand manque d’intérêt de la part de la majorité de la population et des autorités. On verra bien pour les autres années à venir.

Voilà ce que je peux partager avec vous aujourd’hui. Si vous voulez voir plus de photos, visitez mon Flikcr ici.

Tratry ny Asaramanitra e! Bonne année à tous les malgaches!

 


Madagascar : ce que le peuple ne veut plus en 2015

Ce billet s’adresse surtout aux dirigeants de Madagascar.
Il est d’usage, en début d’année, de faire une petite revue de l’année précédente. Certes, nous sommes déjà à la moitié du premier trimestre 2015; mais il n’est jamais trop tard pour tenter de remédier aux erreurs de 2014. Et d’ailleurs, il reste beaucoup à faire.

Je me suis donc permis de dresser une petite liste de ce qui n’allait pas en 2014 et qu’on ne veut plus retrouver en 2015.

1. Délestage:

Les trop fréquentes coupures d’électricité ont entraîné la colère noire des Malgaches, noire comme la seule couleur qu’ils peuvent admirer dans l’obscurité. C’est vrai, les coupures de courant sont rares ces derniers temps, mais qu’on ne nous fasse plus revivre le calvaire de l’année dernière!

2. Dahalo (niova fo ou pas):

Dernier cadeau que l’ancien premier ministre Kolo Roger a balancé aux Malgaches, le dahalo niova fo (bandits reconvertis) est une sorte de repentance générale pour les dahalo après qu’ils ont commis leurs méfaits. Quel que soit leur crime, les dahalo qui ont exprimé leurs remords ont reçu une aide de l’État et surtout l’effacement total et inconditionnel de leur acte.
Pour ceux qui ne le savent pas, initialement connus comme étant des voleurs de zébus, les dahalo terrorisent l’ensemble des campagnes malgaches en mettant à sac tous les villages qu’ils écument. On a assisté donc à l’intouchabilité de ces criminels sous prétexte qu’ils veulent « changer leur cœur » (traduction littérale de niova fo).
A part le doute sur le bien-fondé de l’histoire, c’est aussi la chose la plus enrageante et ridicule que je n’ai jamais entendue. L’État s’est beaucoup plus préoccupé de ces malfaiteurs soi-disant « repentis » tandis que le petit peuple continue toujours d’attendre qu’on se soucie de son sort.

3. Insécurité:

Puisqu’on parle de dahalo, il ne faut pas oublier de parler de l’insécurité. Je viens d’apprendre que les mesures de protection du président Hery Rajaonarimampianina ont été renforcées parce qu’on craint pour sa sécurité [en malgache]. Je me demande si les « gens d’en haut » sont conscients que nous, on n’a pas de garde du corps. On vit tous les jours dans la peur de se faire attaquer. Mon mari déjà été victime d’agression; des amis aussi. Encore heureux qu’il n’y a plus de problèmes de kidnapping d’enfants ces derniers temps.

4. Être classé parmi les dix pays les plus pauvres:

En tenant un blog, on a envie de ne parler que de choses agréables sur son pays. Pourtant en voyant des chiffres accablants montrant que Madagascar est le 5e pays le plus pauvre au monde, c’est plus que désolant, comment rester sans rien dire. Et même si je crois que chacun a sa part de responsabilité dans le développement du pays, c’est avant tout le principal devoir des dirigeants de relever la nation.

Et si on veut vraiment y arriver, il faudra surement commencer par:

5. Arrêter de faire des mauvais plans:

Avez-vous vu ou entendu parler des trous creusés à Ankadifotsy pour planter des arbres? D’accord, des arbres, on en a réellement besoin pour tenter de sauver notre environnement, mais ce n’était absolument pas l’endroit idéal pour le faire. Les responsables s’en sont bien rendu compte, mais c’était déjà un peu tard. On a dépensé de l’argent, du temps, des énervements des automobilistes avant de devoir réparer les erreurs. Et ce n’est qu’un exemple.
Sinon, pourquoi ces minces couches de goudron pour reboucher les nids de poules? Pourquoi ne pas investir beaucoup plus pour les réparations ou même pour les constructions pour ne pas avoir à les refaire l’année prochaine?

6. Arrêter les faux frais:

Les citoyens s’indignent avec les dépenses plus qu’exorbitantes, voire anormales et non nécessaires de l’État pour les parlementaires (rémunérations équivalentes au salaire de deux cadres supérieurs, plus de 3 millions d’ariary de carburant… ). Députés qui, en malgache signifient solombavambahoaka (avocats du peuple), n’ont à aucun moment jusqu’ici représenté mes intérêts mais plutôt les leurs.

7. Fausses promesses:

Par-dessus tout, le peuple en a marre des mensonges, des belles paroles, des promesses en l’air et des excuses qui sonnent creux.

Bien évidemment, la liste peut être encore bien plus longue. J’appelle à votre aide pour la compléter en commentaires. Croisons les doigts pour qu’on se fasse entendre.


Ame soeur, es-tu là?

14 février, jour de la Saint Valentin. N’est-ce pas un jour idéal pour parler d’amour? L’âme sœur: réalité ou objet de torture? C’est la question que m’a posé Lucrèce Gandigbe ainsi qu’à d’autres Mondoblogueurs.

Il y a un dicton malgache qui dit : « Na ny vodin-tsobika aza manan-tandrify » (Traduction littérale. Même le fond d’une soubique – panier – a une destinée). Les Ntaolo ou ancêtres malgaches voulaient dire que tout le monde, les beaux comme les moins beaux, les « normaux » comme les handicapés, les riches comme les pauvres… ont chacun leur destinée. Considérant cela, je pense donc que l’âme sœur existe bel et bien. Après, il faudra la trouver. Et c’est souvent là que ça se gâte. Tu en essaies plusieurs, et tu n’arrives toujours pas à trouver la bonne. D’un coté, ton âge qui n’arrête pas d’avancer te presse à trouver à tout prix cette perle rare. De l’autre coté, il y a ta famille, tes amis, toute la société qui te rabâchent comme quoi il est temps de te caser. Et Mr (ou Mrs) Right qui fait son difficile n’apparait toujours pas. Si tout ça n’est pas un objet de torture, je ne sais pas ce que c’est.

Dans mon cas, l’histoire s’est bien terminée. Un jour, mon homme, il était là et… ce poème vous raconte l’histoire.

Toi, l’étranger

Toi, l’étranger

Que j’ai laissé

M’embrasser.

Mes pensées s’envolent,

Te frôlent,

Et c’est drôle;

Je ne veux pas les retenir.

J’ai envie de me souvenir

D’un ou de deux sourires.

J’ai envie d’apprendre

A croire à tes mots tendres

Et à m’attendre

A ce que l’amour

Puisse un jour

Rester toujours.

Depuis, on s’est marié. Et deux magnifiques gosses sont venus agrandir notre famille, notre Amour.

Pour découvrir la réponse des autres, je vous invite à lire: « Les mondoblogueurs s’expriment au sujet de l’âme sœur »


Mon fils deviendra gay???

Je suis une mauvaise mère. Je suis en train de gâcher la vie et l’avenir de mon fils. Je ne fais pas bien les choses. Non, non. Pire, je les fais de travers. Je bafoue carrément les règles. Je fais tout pour que mon fils devienne GAY. (Et à Madagascar, l’homosexualité est sans doute ressenti comme le pire des drames.) Voilà ce dont on me reproche.

« Mais pourquoi ces jouets de filles? Non, non, non, dis-moi que tu ne laisses pas ton fils jouer à la poupée! Quoi? Tu lui as même offert des dinettes? C’est une blague, c’est ça? Attends un peu, il t’aide même pour de vrai à faire la cuisine? Ton bonhomme de 3 ans? Je n’en crois pas mes oreilles. Mais tu es malade, ma parole? Nom de Dieu, je plains ton petit. Je comprendrai qu’il devienne gay. C’est même certain. Il le sera. Et ce sera ta faute. »

Cette histoire me fait rappeler le billet que mon ami René Jackson a écrit: « Dis-moi, ce que tu bois, je te dirai avec qui tu couches. » Dans mon cas ici, ce serait alors: « Dis-moi les jouets que tu donnes à ton gosse, je te dirai ce qu’il deviendra plus tard. »

Si vous êtes parents, vous avez sans doute déjà fait face à des gens plus experts en parentalité que vous. Nos mères, nos tantes, nos sœurs, nos amies, nos collègues, les autres mamans dans la salle d’attente chez le pédiatre, des gens qu’on ne connait même pas ne se gênent pas pour nous dire: « Non, non, non, ça ne va pas du tout là… Attends, attends, voilà comment tu dois faire! »

DSC_2199D’après les réflexions qu’on m’a faites donc, mon choix d’éducation n’est pas adapté pour un garçon. La poupée, les dinettes, la cuisine sont pour les filles. Au fait, je ne leur ai pas dit, mais je réserve aussi à mon fils l’initiation au ménage et à la lessive pour plus tard. Et j’ai mes raisons.

Mon père a perdu son père très jeune. Ayant dû se débrouiller pour s’en sortir dans la vie, il a très tôt quitté le foyer familial. Livré à lui-même, très vite, il a dû apprendre à tout faire: la cuisine, la lessive, le repassage, le marché… N’ayant retenu que l’énorme côté positif de cet expérience, mon père s’est juré que son fils n’aura pas à découvrir ces tâches tout seul, il les apprendra dès son jeune âge à la maison.

Contrairement à beaucoup de familles, durant notre enfance et adolescence, mes parents ont partagé les corvées ménagères équitablement. Il n’y avait pas de tâches pour filles ou pour garçons. A tour de rôle, ma sœur, mon frère et moi devions faire le ménage, le marché, la cuisine, la lessive… Les gens s’étonnent encore parfois de voir mon frère aujourd’hui prendre un fil et une aiguille pour recoudre lui-même ses vêtements déchirés. En tout cas, je suis convaincue que mes parents ont bien fait. Et je tiens à faire pareil avec mes enfants.

Dans un groupe de mamans sur Facebook, plus d’une fois, des femmes se sont plaintes comme quoi tout leur incombe à la maison. Leur mari ne prend part à aucune tâche ménagère ni s’occupe de bébé. Mais pourquoi dites-vous? Je crois que les jouets ont leur part de responsabilité dans ce problème. Dès l’enfance, les filles ont droit à des kits de cuisine, des poupées, du fer à repasser, des kits de nettoyage… Les garçons s’amusent plutôt avec des voitures, des pistolets, des consoles… Une fois adultes, il devient souvent normal pour certains hommes de croire que les corvées sont donc réservées aux filles. Et c’est ce que je veux à tout prix éviter.

Je n’éduque pas mes enfants à devenir homos ou hétéros. Là n’est pas la question. Mon objectif, c’est que mes enfants deviennent des personnes indépendantes. Il se peut que plus tard, pour diverses raisons, mon fils, puisqu’on parle de lui, se retrouvera seul. Au moins, je peux m’assurer qu’il saura faire mieux qu’une omelette, que sa maison ne sera pas un véritable champ de ruine. Et cela commence avec les jouets et l’éducation à la maison.

Instruis l’enfant selon la voie qu’il doit suivre; Et quand il sera vieux, il ne s’en détournera pas.

 

* Je n’ai rien contre les homosexuels

 


Noël à Madagascar : une copie à améliorer

Madagascar aime bien adopter les célébrations occidentales. Depuis quelques temps, nous avons des adeptes de l’Halloween, par exemple. Mais il y a des fêtes qui datent de beaucoup plus longtemps comme la Saint-Valentin et Noël, justement. Je n’ai aucune idée des débuts de Noël à Madagascar. Ce dont je sais, c’est qu’il y a des choses qui ne collent pas très bien.

Photo-souvenir: Des blogueurs malgaches - 2008
Photo-souvenir: Blogueurs malgaches

Il est maintenant rare de trouver des Pères Noël dans les rues de Tanà. Normal, ils ont crevé de chaleur avec leurs déguisements. Non, je rigole (ou peut-être pas finalement). Il y a quelques années encore, à l’approche de Noël, plusieurs stands se dressaient à Analakely avec des voitures, des carrosses, des Pères Noël et des photographes pour les passants qui voulaient des photos souvenirs. Mais depuis, la commune urbaine d’Antananarivo n’a plus autorisé ces stands. Maintenant, on les rencontre dans les grands centres commerciaux.

Revenons plutôt aux déguisements du Père Noël. Une petite question qui me trotte dans la tête depuis pas mal de temps. Mais faut-il vraiment que la version malgache du Père Noël s’accoutre de tous ces vêtements d’hiver ? Sérieusement, sous le grand manteau rouge, ils ‘étouffent de chaleur. Pour ceux qui ne le savent pas, en décembre, nous sommes en pleine saison chaude et humide à Madagascar. A la place, moi, j’imagine une tenue plus légère : une chemise rouge, un grand short blanc et des sandales.

Autre chose que j’ai remarquée: même certaines chansons de Noël ne sont pas adaptées. Nos gosses se font une joie de chanter en boucle le fameux Petit Papa Noël, « Dehors tu vas avoir si froid« . Non, il n’aura pas froid. Tout au plus, il devrait prévoir un imperméable. Il y a aussi « Vive le vent, vive le vent, vive le vent d’hiver« . Mais quel hiver?

Voilà, je ne cherche surtout pas à gâcher la fête, c’est d’ailleurs l’une de mes préférées. Je tenais juste à partager ces petites réflexions. En espérant un petit changement pour les prochaines années à venir, je vous souhaite à tous un Joyeux Noël.

 


Kidnapping d’enfants à Madagascar: les parents angoissent

Sortir avec le bébé même pour aller chez l’épicier d’en face est risqué. Je suis parent et j’ai actuellement peur pour la sécurité de mes enfants. Et je suis loin d’être la seule. Ces derniers jours, on a assisté dans les principales villes de Madagascar une vague d’enlèvements d’enfants.

Fehizoro, un bébé kidnappé
Fehizoro, le bébé de 2 mois kidnappé – Source: Samia Mieritreritra – Facebook

Tout le monde a été pétrifié d’effroi en apprenant l’enlèvement d’un nourrisson hier (21 octobre 2014). Le bébé a été arraché des bras de sa nourrice. Je suis quelque peu soulagée d’apprendre qu’on a retrouvé le petit Fehizoro et qu’il est sain et sauf. Selon une publication dans le groupe sur Facebook « Samia Mieritreritra » (Que chacun réfléchisse), un couple a découvert le bébé dans leur cour et en a pris soin puis l’a conduit à l’Hôpital des enfants.

Cherche Dimitri, un enfant kidnappé
Capture d’écran Facebook

La chance a également souri aux parents de Dimitri, 14 ans, car ce dernier a été relâché par ses ravisseurs. Il parait que ce garçon a trainé avec ses copains Karàna (Indo-pakistanais) lorsqu’il a été kidnappé. Il a ensuite été libéré parce qu’il y a eu méprise sur l’origine de la personne, Dimitri n’est pas Karàna.

Mais qu’en est-il de la fille de 16 ans d’Antsirabe (en malgache)? L’a-t-on retrouvée? Aux dernières nouvelles, cette lycéenne a disparu de son école le 17 octobre 2014. Il parait qu’elle était à bord d’une 4×4 en direction de la Capitale.

Et quelle est la suite de l’affaire sur l’enfant de 6 ans décapitée? L’enquête avance-t-elle? Cette histoire m’a carrément glacé le sang. Je ne souhaite à aucun, même à mon pire ennemi, de vivre pareil cauchemar.

La population malgache a le sentiment d’être complètement désarmée face à cette vague de kidnapping d’enfants. En effet, il semblerait que la police n’y accorde guère d’importance. Pire, selon certaine source (en malgache), les autorités policières en viennent même à ignorer les plaintes déposées auprès d’elles concernant l’affaire Fehizoro.

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Capture d’écran Facebook

Les parents, angoissés, se posent des questions. Certains se demandent si ce n’est pas un trafic d’organes. D’autres pensent que c’est pour détourner l’attention des citoyens face à la situation politique actuelle du pays, ou les problèmes de délestage.

Comment protéger nos petits? Des précautions s’imposent. Une maman a conseillé de ne plus publier des photos de nos enfants et des informations les concernant sur Facebook; tout au moins qu’elles restent privées. Une autre fait appel à une séance de prière collective. Mon mari et moi avons décidé que, désormais, nous accompagnerons toujours nos enfants à chacun de leur déplacement. Pour le moment, la nounou est déchargé de cette responsabilité. On arrivera bien avant la sortie des classes pour s’assurer que personne ne récupère notre enfant avant nous.

J’espère que cette situation ne s’aggravera pas. J’espère pouvoir avoir à nouveau l’esprit tranquille quand mon fils est à l’école. J’espère ne plus avoir peur de sortir dans la rue avec mes enfants.


#BAD2014 #Madagascar Inégalités hommes-femmes

On s’en plaint rarement, peut-être juge-t-on que c’est sans grande importance, mais il y a bien des inégalités à Madagascar vis-à-vis des femmes par rapport aux hommes. Aujourd’hui, pour la Blog Action Day qui a justement pour thème l’inégalité cette année, est une bonne occasion d’en parler.

Lessiveuse dans l'eau de l'Ikopa

Il y a inégalité quand tu es une femme et que tu ne décroches pas un boulot si tu es mariée.
Êtes-vous mariée ? Non. Vous sortez avec quelqu’un en ce moment ? Euh, non. Euh, pourquoi cette question personnelle ?
On veut s’assurer qu’une fois titularisée, vous n’allez pas vous marier et faire des enfants.
C’était à un entretien d’embauche.

Il y a inégalité quand tu es une femme et que tu n’obtiens pas de promotion parce que tu risques de tomber enceinte, tu l’es ou tu as des enfants en bas âge.
Dans l’ancienne société où j’ai travaillé, le Chef a carrément avoué qu’elle ne voulait plus de femmes pour renforcer son équipe, mais uniquement des hommes pour les raisons citées ci-dessus.
Je connais aussi une enseignante qui a été renvoyée parce qu’elle était tombée enceinte et qu’elle ne pouvait plus assurer toute l’année scolaire.

Il y a inégalité quand il n’y a que « assistance maternelle ». Et les pères alors ? Ils n’ont pas le droit de s’occuper de leurs enfants ? Une fois, je suis tombée malade, les enfants aussi. Mon mari a demandé la permission de s’absenter à son travail. Réponse : Non. Emmener les enfants chez le médecin, c’est le problème de ta femme.

Il y a inégalité quand toutes les corvées ménagères sont dévolues à la femme. Et oui, nous avons des machos à Madagascar. Le problème vient souvent de l’éducation familiale. Ce sont la mère et les sœurs qui font tout à la maison. Et ça devient une habitude et « normal » pour l’homme de ne rien faire.
Tous ne sont pas comme ça mais il y en a quand même beaucoup vu les discussions entre femmes que j’ai suivies sur les réseaux sociaux.

Il y a inégalité quand tu es une femme et que tu n’as pas droit à un crédit auprès d’une institution financière.  Dans une région de Madagascar, j’ai entendu dire que les femmes seules ne peuvent pas signer un contrat de crédit. Ce sont leurs maris qui doivent signer pour elles.

Il y a inégalité quand une femme ne peut pas diriger le pays. Lors des dernières élections présidentielles en 2013, plusieurs personnes ont dit qu’elles ne pouvaient pas accepter qu’une femme soit au pouvoir. Pour eux, c’est l’homme qui est prédestiné à être chef: Chef de famille, Chef du pays.

Il y a inégalité quand le nombre de femmes est inférieur à celui des hommes au Parlement.
Non, je rigole.
Il faut arrêter de demander à ce qu’il y ait 50% d’hommes et 50% de femmes. Ce n’est pas le nombre qui compte mais le principe qui édicte qu’on donne exactement la même chance aux hommes qu’aux femmes pour une même place. Il faut apprécier les compétences de chacun et non se sentir obligé d’atteindre un chiffre quelconque.

 


Dix raisons pour ne pas respecter la loi

La mise en application des lois, nouvelles ou anciennes, suscite presque toujours des débats parmi les Malgaches. Quelques exemples: le port obligatoire de ceinture de sécurité, le port de casque pour les motards, la fermeture des magasins de boissons alcoolisées à 21 heures. Maintenant, il y a les plaques d’immatriculation des voitures. Mais pourquoi donc ? Ci-dessous les réponses que j’ai trouvées suite à des discussions entendues ici et là, que je ne cautionne pas forcément.

1. La loi est n’est pas pour tous. Le petit citoyen se dit : « Les dirigeants qui nous gouvernent violent la loi chaque fois qu’ils le peuvent… Alors, pourquoi je m’y plierais ? » Puisque les plaques minéralogiques sont le sujet chaud du moment, je vais les prendre comme exemple. La loi exige la normalisation de ces plaques : écritures blanches sur fond noir. « Bof… Où sont d’abord ces fameuses plaques rouges de l’administration ? », réclament les automobilistes.

2. Les citoyens savent que s’ils s’entêtent, l’Etat va céder. Tiens, un autre sujet chaud : la vente à la sauvette (et oui, il n’y a pas que le Mondial). Combien de fois ces vendeurs ont-ils été renvoyés, pourchassés ? Combien de fois leurs marchandises ont-elles été confisquées? Personne n’a réussi à résoudre ce problème jusqu’ici.

3. Vive la corruption. Les papiers de la voiture ne sont pas en règle? Ou on a commis des infractions routières ? Il suffit d’avoir un peu d’argent à donner aux agents et le problème est réglé. A ses 18 ans, mon frère, comme la loi l’exige, a demandé une carte d’identité nationale. Et voilà ce qu’un des responsables à la mairie lui a dit en douce : « Ecoute « zandry » (petit), il n’y a pas d’imprimés pour le moment, mais j’en ai déjà réservé un exprès pour toi. Tu me files 5000 Ar et tu auras ta carte la semaine prochaine au lieu d’attendre un mois ou plus, rien n’est sûr. » (Dommage pour ce gars, mon frère n’était pas pressé)

4. L’illégalité devient une pratique courante à un tel point que la majorité de la population pense que c’est tout à fait normal. Fumer dans les lieux collectifs est interdit mais est-ce que les fumeurs s’en préoccupent ? Attendons de voir comment les autorités géreront cela au mois d’octobre quand l’arrêté interministériel n° 29.511/2013 entrera en vigueur.

5. Les délits mineurs sont considérés comme insignifiants ou peu importants. Par exemple, uriner ou déféquer sur la voie publique. Je ne comprends même pas qu’on ait besoin de loi pour interdire un tel acte, c’est tellement logique pourtant.

6. Les lois dont l’Etat a récemment exigé l’application ne sont pas une priorité pour le pays, disent les citoyens. « On s’en fout. Mais qu’est-ce qu’ils croient ces dirigeants ? Qu’en nous obligeant à mettre notre ceinture de sécurité, ça sortira Madagascar de la pauvreté ?… Ahhhh, au lieu de nous embêter avec la plaque de notre voiture, qu’attendent-ils pour traquer les voleurs? « , rognent les gens.

7. La sévérité et la ferveur des autorités ne durent pas bien longtemps. Au début, on a peur. Après, on se rend compte que voilà, les vitres teintées reviennent, ainsi que les voitures à volant à droite…

8. La mise en oeuvre de certaines lois est stupide anormale. Toujours concernant la circulation routière, pour la police, le port de ceinture de sécurité ne semble obligatoire que pour le conducteur mais pas pour les autres passagers. Un enfant de moins de 5 ans ne peut pas s’asseoir sur le siège avant de la voiture, mais il n’y a aucun souci lorsqu’un bébé ou un enfant monte avec ses parents sur la moto. Il suffit juste à l’enfant de porter un casque.

9. Certains font leur propre loi. Cas de la vindicte populaire. On se rappelle du triple lynchage à Nosy Be ou du cambrioleur amputé à Toamasina (photos choquantes). Défaillance de la justice ou pas, rien n’excuse une telle barbarie. 

10. Bref, les citoyens n’aiment pas la loi. Peu importe la loi qui va sortir, peu importe sous quel régime (politique), personne ne va s’y soumettre sans rechigner.

Petit cadeau : une vidéo qui montre la circulation à Behoririka (Centre-ville d’Antananarivo) en fin d’après-midi du 24 juin dernier


Le Nouvel An Malgache

Mais quel nouvel an Malgache? Quand ça? Je n’ai jamais entendu parler de ça… Moi non plus… Moi si, mais je crois que c’est quelque chose qu’ils ont inventé tout récemment… A quoi bon?… Pourquoi pas… L’annonce dans les médias de la célébration prochaine du nouvel an malgache a créé une polémique.

Pour essayer de répondre à certaines questions, j’ai pris contact avec le compte Facebook « Taombaovao Malagasy » (vous l’avez deviné – Nouvel An Malgache). Notre échange s’est fait entièrement en malgache. Et les réponses sont assez longues. Alors, j’ai décidé de le partager dans sa version originale: Taombaovao Malagasy (en pdf). Sinon, les grandes lignes seront relevées en français dans ce billet. J’essaierai de traduire le document pour plus tard et vous tiendrai informé au bas de ce billet.

1.Qui est derrière le compte de « Taombaovao Malagasy »?

« Le compte Facebook de « Taombaovao Malagasy » regroupe quelques historiens malgaches et des personnes ayant suivi les célébrations du nouvel an malgache depuis 2009.

Nous sommes conscients que la solidarité des Malgaches et la valorisation de l’identité malgache sont parmi les bases requises pour lutter contre la pauvreté et l’accaparement de la richesse nationale par les étrangers. »

2. A quelle date célèbre-t-on le Nouvel an malgache?

« Avant la colonisation de Madagascar, chacune des ethnies malgaches avaient leur propre calendrier. Depuis le règne de Radama II jusqu’à Ranavalona III (1883-1896), les 3/4 du peuple malgache ont commencé à avoir le même calendrier. Toutefois, dans toutes les ethnies, chaque début de mois est défini par l’observation du premier croissant de lune. Tous – notamment les descendants de marins indonésiens, arabes, bantous, portugais, indiens et juifs – observaient le calendrier lunaire et la position des 12 constellations dans le ciel.
La date du premier jour de l’an ainsi que l’histoire qu’a vécu chaque ethnie variaient également suivant les monarques qui se sont succédé.
L’occupant français a supprimé cette célébration en 1896 et l’a changé à la date du 1er janvier. Jusqu’à nos jours, les autorités successives ne se sont pas intéressés à changer cela.

Depuis 2007, nous avons à nouveau célébrer le Nouvel an Malgache. L’Académie Malgache et le Centre Culturel Malgache ont annoncé que le Nouvel an Malgache sera dorénavant célébré au jour de l’observation du premier croissant de lune proche du 21 mars. »

Plusieurs avis divergent quant à l’origine de ce nouvel an. 3. Est-il uniquement celui des Merina (un groupe ethnique – peuple occupant la partie nord des hautes terres centrales de Madagascar) ou de tous les malgaches?

« Le nouvel an malgache n’est pas un nouvel an Merina. Pour preuves:
Premièrement, selon l’histoire, les Ntaolo (ancêtres) n’utilisaient pas le mot « taombaovao » mais « tonontaona« . L’appellation du nouvel an n’a cessé d’évoluer pour le peuple d’Imerina. Du Roi Ralambo (1575-1610) au Roi Andrianampoinimerina (1787-1810), on l’a appelé « Alahamadibe » (jour du roi). Il y avait d’autres festivités telles que l’ « Alakaosibe » et l’ « Adijadibe » qui promouvaient les « pratiques païennes ». Ces célébrations portant des noms de mois sont donc des rituels païens et des cultes des morts. A l’arrivée de la religion chrétienne en 1810, les rois qui se sont convertis au christianisme ne voulaient plus utiliser le nom « Alahamadibe » (jour du roi) mais « Fandroana » (bain sacré) pour désigner le début de l’an. Il n’était plus question de pratiques païennes ou de cultes des morts durant les célébrations. Au temps de la reine Ranavalona III, elle a changé le « Fandroana » (bain sacré) en « Asaramanitra » (grande fête) qui était désormais fêté à la date de son anniversaire – le 22 novembre. Par conséquent, le nouvel an malgache n’a rien à voir avec l’ « Alahamadibe« , le « Fandroana » et l’ « Asaramanitra » d’où le nom « Taombaovao Malagasy » pour marquer sa différence.
Deuxièmement, le Nouvel An Malgache est célébré le jour où l’on observe le début de croissant de lune le plus proche du 21 mars et non pas le 22 novembre comme l’a fait Ranavalona III. Le but n’étant pas de se rattacher à un ou des rois/reines Merina mais de renforcer le « fihavanana » (valeur ancestrale qui constitue le cœur de l’entraide et de la solidarité au sein de la population malgache) parce que le «Taombaovao Malagasy» ne distingue ni ethnie, ni religion, ni origine ni race.
Enfin, il n’ a jamais été question de célébrer le Nouvel an Malgache selon les rituels Merina. L’organisation de l’événement est libre et dépend des organisateurs et des régions. On encourage même l’adoption des couleurs de chaque région, de chaque ethnie pour la célébration du nouvel an dans tout Madagascar. Par ailleurs, chaque groupe religieux peut célébrer selon leurs pratiques. Les artistes et tout secteur d’activités peuvent également célébrer comme ils le souhaitent: par exemple, des danseurs vont faire des représentations au devant de Tahala Rarihasana. Des restaurants organisent des repas festifs. Les élèves de « Kabary » (art du discours) de la Fjkm Ambohidrabiby font également des représentations lors du nouvel an malgache. »
"Afo tsy maty" ou feu éternel
« Afo tsy maty » ou feu éternel – (c) Ariniaina 2010

4. Comment se déroule la célébration?

« La célébration du nouvel an malgache est libre car il n’y a aucune distinction de religion, d’origine ou de race. Cela dépend des organisateurs. Notons aussi que les rituels ont changé tout au long des siècles et chacun avait leur manière de célébrer le nouvel an. Par exemple, avant l’avènement de la religion chrétienne, les festivités comportaient des cultes des morts et des pratiques païennes. Depuis le règne de Radama II (1861-1863) jusqu’à la fin des royaumes malgaches (1896), le « Fandroana » (bain sacré) et l’ « Asaramanitra » (grande fête) étaient célébrés selon les pratiques chrétiennes.
Comme le « Taombaovao Malagasy » ne veut pas qu’on distingue la religion, l’origine ou la race, le Centre Culturel Malgache n’associe aucune pratique religieuse à la célébration du nouvel an malgache. Le Centre Culturel Malgache a donc supprimé tout ce qui concerne les pratiques religieuses notamment les cultes des « sampy » (idoles), les sacrifices d’animaux, les cultes des tombeaux. L’allumage des « afo tsy maty » (feux éternels), le port des « harendrina » (lampions), les « tsodrano » (bénédictions) sont gardés et peuvent changer d’une région à une autre.
Cela n’empêche pas les groupes religieux ou les villages de célébrer le nouvel an comme ils le souhaitent et selon leurs pratiques. Les descendants d’Ambohidrabiby organisent un culte œcuménique à la Fjkm Ambohidrabiby le samedi 29 mars 2014 à partir de 14heures. L’association Mamelomaso, par exemple, suit la tradition merina pour la célébration du nouvel an malgache. Des écoles célèbrent également ce jour au sein de leur établissement respectif. Les descendants des familles royales célèbrent selon leurs propres rituels.
Les "Harendrina" ou lampions - (c) Ariniaina 2010
Les « Harendrina » ou lampions – (c) Ariniaina 2010

5. Comment se fait-il qu’il y ait beaucoup de malgaches qui ignorent l’existence de cet événement?

« Premièrement, les habitants des campagnes ont toujours célébré l’ « Alahamadibe » mais en cachette car la société les prend pour des païens. Le « Fandroana »  a été supprimé depuis l’annexion de Madagascar.
Deuxièmement, la célébration du nouvel an malgache n’a pas été enseigné à l’école.

Et enfin, compte tenu du budget limité, seule Antananarivo est sensibilisée. De nos jours, il y a de plus en plus de Malgaches qui parlent de ce nouvel an parce que les médias en parlent grâce aux efforts déployés par le Centre Culturel Malgaches et leurs partenaires. Aussi, beaucoup actuellement n’hésitent plus à célébrer cet événement à leur propre manière. »

6. Est-il important de faire revivre le nouvel an malgache?

« Oui. Et il y a 3 grandes raisons pour cela.
Premièrement, la célébration du nouvel an malgache diffère de celle du 1er janvier. Les ancêtres malgaches accordaient de l’importance à la purification du cœur, de l’esprit et de l’environnement pour le retour aux valeurs, pour se réconcilier, pour renforcer le « fihavanana » (valeur ancestrale qui constitue le cœur de l’entraide et de la solidarité au sein de la population malgache).
Deuxièmement, c’est une opportunité d’améliorer l’économie malgache grâce au développement de l’artisanat et du tourisme.
Et enfin, plusieurs pays (les occidentaux, les chinois, les arabes, les pays musulmans…) ont su garder leur propre nouvel an. Le notre a été supprimé par la France en 1896. Le fait d’avoir un nouvel an malgache officiel prouverait que Madagascar jouit de sa pleine souveraineté.
Un grand "Fanorona" (échiquier malgache) - (c) Ariniaina 2010
Un grand « Fanorona » (échiquier malgache) – (c) Ariniaina 2010

7. Quand est-ce que le Nouvel an Malgache sera célébré cette année? Quelles sont les programmes prévus pour l’occasion?

« C’est pendant la nuit du 30 mars 2014  qu’on observe le croissant de lune le plus proche de l’équinoxe du 21 mars. Mais comme nous, Malgaches, considérons que la journée commence le matin, le premier jour de l’an sera donc le 31 mars 2014.
Le 30 mars, on allumera le « afo tsy maty » (feu éternel) à Andohalo qu’on emmènera par la suite à Ikianja Ambohimangakely le même jour. Tous ceux qui désirent prendre ce feu peuvent venir à Andohalo ou à Ikianja et apporteront des bougies.
Le 31 mars, il y aura une célébration à Ikianja Ambohimangakely.
Des festivités sont également prévues à Imerimanjaka la nuit du 30 mars et le 31 mars.
Il y aura un culte œcuménique à Ambohidrabiby le 29 mars à partir de 14 heures.
Une porte ouverte sur le Nouvel an Malgache se tiendra au Tahala Rarihasina du 29 mars au 02 avril.
Comme tous les ans, le Nouvel an Malgache sera également célébré à Ambohimanga Rova et à Avarabary Imerintsiatosika les 30 et 31 mars.
D’après les médias, Vohémar et Antsirabe célèbreront également le « Taombaovao Malagasy« .
En outre, plusieurs restaurants organiseront des repas festifs et des écoles fêteront également le Nouvel an Malgache.
Le partage du feu éternel - (c) Ariniaina 2010
Le partage du feu éternel – (c) Ariniaina 2010

8. Quelle est la position de l’état vis-à-vis du Nouvel an Malgache? Prend-il part à sa promotion?

« Avant 2013, l’État Malgache  ne s’est pas du tout intéressé à la célébration du Nouvel an Malgache. Il redoutait les critiques venant de leurs électeurs qui sont presque tous chrétiens. Entre autre, la vraie date du jour de l’an reste confuse. Cependant, des collectivités décentralisées ont toujours collaboré avec le Centre Culturel Malgache dans l’organisation du « Taombaovao Malagasy« . L’Office Régional du Tourisme d’Analamanga est parmi les partenaires les plus actifs de l’événement.

C’est en 2013 que l’on a ressenti un changement émanant de l’État grâce à la présence d’une haute personnalité politique  et sa prise de parole lors de la célébration du Nouvel an. Toujours en 2013, la RNM (Radio Nationale Malgache) a consacré tout un programme sur le Nouvel an Malgache.

Pour le 31 mars, on a bon espoir de mobiliser bon nombre de hautes personnalités étatiques.

9. Avez-vous des messages ou commentaires particuliers à partager aux lecteurs?

« Il est complètement faux de dire que le Nouvel an Malgache est une fête des familles royales. Ceci est une fête nationale qui ne verse point dans une quelconque discrimination. Nous invitions tous les Malgaches de part le monde à célébrer notre Nouvel an le 31 mars 2014 selon les convenances de chacun. Tous ceux qui désirent organiser une fête pour l’occasion peuvent prendre contact avec le Centre Culturel Malgache via Facebook « Trano Koltoraly Malagasy » ou auprès de son bureau à Ikianja Ambohimangakely. Venez nombreux pour assister aux événements d’Andohalo, d’Ikianja Ambohimangakely et d’Ambohidrabiby dont l’entrée est gratuite.
Nous souhaitons à tous les Malgaches de par le monde une bonne année ce 31 mars 2014. »Je remercie « Taombaovao Malagasy » de nous avoir aidé en nous donnant ces quelques explications.Le débat reste tout de même ouvert. Les doutes persistent peut-être encore quant aux dates exactes du nouvel an (Mars, Juillet ou Novembre?). Les avis divergent également sur la nécessité ou pas de célébrer ce Nouvel an Malgache. J’attends vos commentaires.

(J’ai pris ces photos à Andohalo lors de la célébration du Nouvel an Malgache en 2010. J’ai d’ailleurs partagé mes expériences dans ce billet [EN])