Antananarivo: Chasse aux pisseurs de rue
Un jour, j’ai emmené mon petit frère avec moi pour aller acheter des ceintures de karaté en ville. Il devait avoir 7 ans. A peine les ceintures achetées, voilà que mon frère a eu envie de faire pipi. Panique! Panique! Où peut-il faire son besoin? Pas de pissoir aux alentours. Le plus proche, qu’on surnomme « Métro » car il se trouve dans le sous-sol de l’esplanade d’Analakely, était à 10mn à pied. Mais c’était tout sauf propre. Pas question pour moi d’y mettre les pieds. Je lui ai alors proposé de faire vite derrière une voiture garée à côté. Je lui ai même convaincu que personne ne pouvait le voir. Mais mon frangin ne voulait rien savoir. L’éducation de maman lui interdisait d’uriner n’importe où. Alors aucune discussion possible. Grande sœur, qui n’était encore qu’une pauvre étudiante à l’époque, n’avait qu’une solution: prendre un taxi pour le ramener au plus vite à la maison.
Je me souviens m’être engueulée avec ma mère une fois à la maison. Comme quoi à cause de son éducation, je me suis ruinée en taxi. Mais à bien y réfléchir maintenant, je suis fière que mon frère ne soit pas comme ces pisseurs de rue qui salissent l’environnement. On dirait même qu’il suffit qu’un seul commence à arroser un mur ou un poteau pour que d’autres le suivent. Il arrive très souvent qu’on doit passer à de tels endroits et non seulement ça pue, mais on ne sait plus où mettre les pieds.
Depuis longtemps des avertissements sont laissés sur les murs: « Alika no mamany eo » (Sont des chiens qui pissent là), « Raràna ny mamany eto. Dina 5 000Ar » (Défense d’uriner ici sous peine de payer une amende de 5 000Ar). Plus tard, quelqu’un a même eu l’idée de mettre: « Dina 10 000Ar miampy daroka » (Amende 10 000Ar et des coups). Mais assouvir les besoins de faire pipi semble être plus fort. D’ailleurs, a-t-on déjà réellement vu quelqu’un mettre en application ces messages et réclamer les « dina » ?
Détrompez-vous les gars de Tanà! Aucune intention de ségréguer ici mais c’est vrai quoi, 99% de ces pisseurs de rue sont des mâles. Je disais donc, faites gaffe! Depuis quelques temps, j’ai remarqué un camion-bus blanc de la police municipale arriver à l’improviste près du pont de Behoririka. Sa mission: embarquer tous ceux qui urinent sur la voie publique. Je ne sais pas ce qui attend ces personnes arrêtées. Seront-elles enfermées pendant 24 heures? 48 heures? Devront-elles payer des amendes? Recevront-elles juste un avertissement pour cette fois? En tout cas, je salue cette initiative. Ces personnes réfléchiront sans doute à deux fois avant de sortir leur engin pour arroser d’autres murs ou trottoirs. Si ces arrestations continuent, du moins dans mon quartier, je pourrai peut-être apprécier un peu mieux ma véranda. Parce que, j’avoue, il y a des moments où les odeurs de pisse arrivent jusque chez moi. C’est insupportable! C’est dégueulasse! C’est révoltant!
Mais pourquoi uriner dans la rue? J’ai demandé à quelques personnes et en gros, les raisons sont les suivantes. Les pissoirs publics sont insuffisants. Le prochain est trop loin. Du coup, quand l’envie est pressante, le coin de la rue aide. D’autres se plaignent des 50Ar et 100Ar qu’il faut payer dans ces WC publics. Ils ne comprennent pas pourquoi on doit payer pour un service public. Et pourtant cette petite somme sert à entretenir les toilettes. En même temps, il ne faut pas s’attendre à une propreté totale hein. Disons que certaines toilettes sont plus ou moins supportables que d’autres. Sinon, certains ont juste répondu: par mauvaise habitude (avec un petit sourire aux lèvres).
Il fait assez froid actuellement dans la capitale. Et on comprend que les envies d’uriner deviennent plus fréquentes. Mais attention, la chasse aux « arroseurs » de rue est ouverte! D’ailleurs, hier, elle a été bonne pour la police municipale. J’ai pu compter une dizaine de personnes embarquées dans le camion-bus.
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